Merci Jean Léon, oui elle a le mérite d'exister. L'appareil photo n'était pas toujours dans nos priorités.
Mes souvenirs sont vagues mais selon les anciens OMS cela leur rappelait un peu le parc aux buffles de Cholon ? En pleine brousse, imaginez un terrain de foot entouré de gargottes, de paillotes, ou l'on pouvait manger, boire et ... danser dans une entêtante odeur de clous de girofles. Je n'ai connu de tels établissements de cette échelle qu'à Panama, Curaçao (le campo allegre) ou Bangkok. Ce furent de belles retrouvailles entre le Bourdais et la Garonne.

Je voulais sortir le chien mais il pleut. En attendant une éclaircie, je reviens sur ACB.
Dans la rubrique "que faisait le Commandant Bourdais il y a exactement XX années ?",
après 1976, voyons les années 1977 et 1978 :

Le mercredi 9 mars 1977, le Commandant Bourdais était en IPER à Lorient.
Ce jour-là, les services trans et det - qui faisaient partie de la même compagnie - se réunissaient pour la rédaction du rapport sur le moral.
Ce même jour avait lieu un autre évènement important qui n'arrive pas tous les jours dans la vie d'un bâtiment, même en IPER : le mât était carrément découpé à la base et déposé sur le quai. Hé oui ! le Bourdais repartira de Lorient avec un mât tout-beau-tout-neuf.

Le mercredi 8 mars 1978, le Commandant Bourdais était en transit entre Dzaoudzi et l' Ile Maurice avec, entre les deux, un très bref passage par La Réunion. 
Le bâtiment étant en mer, un pot était organisé sur la plage arrière pour le départ du commandant en second. Tout le monde y était invité. Sympa le CSD !

Le jeudi 9 mars 1978, le Commandant Bourdais ne restait que quelques heures au mouillage au large de Port des Galets, juste le temps d'embarquer COMAR La Réunion et le QM2 radio TELIER. 
Appareillage pour l'Île Maurice aussitôt après.
Cette escale que l'on peut qualifier de "technique" nous a-t-elle permis de conserver la solde Comores, bien plus avantageuse que la solde Réunion ? J'ai oublié mais le pacha a certainement tout fait pour.

Le Commandant Bourdais arrivait à Port Louis de l' Ile Maurice le lendemain matin.
Nous y resterons jusqu'au jeudi 16 mars mais c'est la veille, avec 48 heures d'avance, que j'ai fêté mon anniversaire à l' Ile Maurice avec mes amis et colocataires de P12, Marcel Collet et Jean-Robert Audry. C'était dans un restaurant chinois de Port Louis et je me souviens que le vin qui accompagnait notre repas était un rosé sud-africain qui s'appelait "Napoléon" (par ailleurs excellent).

Pour l'anecdote : à La Réunion le 17 mars et les jours suivants, je fêtais une deuxième fois mon anniversaire mais cette fois avec Jean-Pierre Le Faucheur, chef de la station émission, et Pédro Blanco, patron radio d'un autre aviso escorteur de ZMOI. Nous étions tous les trois à Rufisque (Sénégal) dans les années 1968-1970 comme SM chefs de quart et nous avons tous les trois fait le même BS 1970-1971 aux Bormettes. Le monde est petit.

msg 352 : le 9 mars 1977, le Commandant Bourdais était donc guillotiné. Couic ! coupé le mat. 

Photo Max Péron
Si vous enlevez ça, le Bourdais, il ressemble à quoi ? 
A rien

Quelques jours plus tard, le mardi 9 mars 1977, l'amiral commandant la Marine à Lorient faisait reconnaitre le capitaine de frégate Pierre Calmon comme nouveau commandant du Bourdais, en remplacement du capitaine de frégate Gagelin. Cette cérémonie de prise de commandement eut lieu ... sur le quai, ce qui est peu banal pour un bâtiment de surface. Le navire, (presque) complètement désossé, était en cale sèche. Ce n'était plus un aviso escorteur mais un vaste chantier. Pour ce grand carénage, l'équipage avait perdu plus des deux tiers de ses effectifs. 

Dans son discours, le nouveau commandant nous fit part de son amertume de prendre son commandement dans de telles conditions. A mon humble avis, il aurait dû voir le bon côté des choses. L'avantage d'être présent à bord durant toute l'IPER, c'est que l'on peut suivre étape par étape tous les travaux qui s'y déroulent, discuter avec les ouvriers et techniciens, se faire expliquer tel ou tel point un peu obscur, prendre des notes, demander quelques modifications qui n'étaient pas officiellement prévues, etc. Après ça, on connait le bateau par cœur. Le jour où le Bourdais quittera définitivement la France pour retourner en campagne outre-mer, le commandant sera peut-être très heureux de disposer au sein de son équipage d'un noyau dur de gradés connaissant parfaitement le bâtiment, dans tous les domaines et dans ses moindres recoins.
Pour lui-même, c'est également un plus indéniable par rapport - par exemple - à son prédécesseur qui venait de l'ambassade de France à Moscou et qui a donc pris du jour au lendemain le commandement d'un navire opérationnel qu'il ne connaissait pas ou très peu.

Le lundi 4 avril 1977, l'enseigne de vaisseau de 1ère classe détecteur Noël Hascoet remplaçait le lieutenant de vaisseau Hébert comme chef du service transmissions. Un radariste pour commander des radios, des transmetteurs et des transfilistes ! Heureusement qu'il y avait un maître adjoint pour le seconder dans sa tâche. Devinez qui ?

Photo Max Péron
Photo prise le mardi 22 mars 1977 à l'issue de la prise de commandement du capitaine de frégate Pierre Calmon, le Commandant Bourdais étant en IPER à Lorient.
Regardez bien le Bourdais en arrière plan : il n'a plus de mât !

Les sept OMS qui sont restés à bord pour l'IPER
De G à D, MP elect ROLLAND (président), PM trafi Marcel COLLET, MP mecan MIANE, PM emsec CABON, PM navis PROVOST, PM bosco LASQUELLEC et ma pomme à droite toute.
Avant l'IPER, 16 OMS
Après l'IPER, 21 OMS !

Photo Max Péron
1977 le Commandant Bourdais, sans mât, en cale sèche à Lorient.
Au fond à gauche, on distingue le clocher de l'église Saint-Louis située en centre ville.

Les médailles ?
Quelles médailles ?

A l'époque, c'était ZERO médaille pour les surfaciers.
En 1976, onze mois de campagne embarquée sans famille.
En 1978-1979, seize mois de campagne embarquée sans famille.
Sur douze mois en ZMOI, 210 jours de mer.
Nombreuses missions opérationnelles

Entre autres, interception de la Force 61K soviétique et, malgré des menaces (canons pointés sur nous), immixtion du Commandant Bourdais dans l'armada soviétique.
Le Commandant Bourdais, seul bâtiment de guerre français présent sur zone durant toute la révolution iranienne avec une grande incertitude sur la réaction des forces armées iraniennes.
Défense des intérêts français dans les eaux territoriales des Kerguelen (chasse aux navires de pêche russes)
etc. etc.

Un anecdote qui m'a beaucoup ému :
quand nous sommes rentrés à Lorient en janvier 1977, un gars du bord a vu son enfant pour la première fois. 
Cet enfant avait un an et des poussières. Il marchait, il savait dire "maman" mais il n'avait encore jamais vu son père.
Je n'étais pas du tout concerné mais, mon épouse et moi, cela nous a beaucoup touchés.
De nos jours, ce genre de situation est-il encore possible ?

En trois ans et deux mois d'affectation à bord du Commandant Bourdais, je n'ai JAMAIS vu une seule remise de décoration.
A l'époque, c'était comme ça ...

Pendant mon affectation sur la Duquesne, je crois que nous faisions 300 jours de mer par an, essentiellement le Liban, les missions Olifant s'enchainaient. A cette période j'ai eu une deuxième fille. Bref, sur zone j'apprends que je suis redésigné campagne, re Tahiti, et re Super Mahina, Youpi !!!
Un collègue, sur place me dégotant un faré, j'ai pu partir en famille. Paris-Los Angelès-Papeete, mon épouse, mes deux filles et moi. Ma deuxième, agée de 10 mois, pique une crise, et, sur les vols à l'époque, elle n'avait pas droit à une place assise. J'ai voulu soulager mon épouse et prendre la petite sur moi. Impossible ! Elle hurlait dès que je lui tendais les bras. A vrai dire, elle ne me connaissait pratiquement pas.
Nous sommes arrivés à Faaa dans un état second, dans un faré totalement isolé. Immédiatement, il a fallu louer une voiture et aller faire le plein du frio. Heureusement nous avions la caisse de dépannage avec le minimum vital.
Il a fallu un peu de temps pour apprivoiser ma fille.
Question décorations, j'étais le Qm le plus décoré de la station et, passé SM, le SM le plus décoré aussi, avec ma Hernu Cross, agraffes mission d'assistance extérieure et bâtiment de combat et la médaille d'outre mer agraffe Liban.
Bien amicalement
TUR2

Amusant aussi, le fait que de Qm major sur la Duquesne, je suis passé Qm Mexicain à Tahiti. Il n'y a vraiment que la Marine pour te mettre dans des situations pareilles.

La luxure n'est pas forcément là où on l'attend

Suite de l'escale  à Medan-Belawan. Aujourd'hui grande excursion dans les montagnes en compagnie de nos camarades de la Garonne. Pour faire court, je vous invite à lire la légende de la photo.

Photo DR Jean-Paul lecouvey - Sumatra excursion - Octobre 1974.

Volcaniques ? A vrai dire, notre ami avait de fortes chances d'être secoué. Un vrai shaker que Sumatra, une nouvelle plaque tectonique en formation. Normal que les habitantes n'en soient pas épargnées. Devant les incertitudes naturelles, il faut profiter de la vie full-speed.
Cyclones, éruptions volcaniques, séismes, tsunami, innondations sont le lot de l'endroit.
Le cannibalisme, dit-on, aurait disparu, et la charia locale serait plus permissive...

Je confirme que ce fut une escale très volcanique avec éruptions du type peléen. Le matin, je suis rentré sur les genoux, vidé... ça m'a valu d'être consigné 1 jour à Bangkok mais sans regret

Pour Max année 1977

toujours pour Max année 1978

Merci P'tit Jean !

"Le courrier sur un bateau en campagne, c'est très important pour le moral de l'équipage"

Une des très nombreuses lettres écrites à mes parents durant mes années Marine (ils ont tout conservé !)

Dzaoudzi, le 14 juin 1976

Chers parents,

Vous vous demandez sans doute ce que je deviens. Eh bien, après un séjour à l'île Maurice, le Bourdais est de retour aux Comores depuis le début du mois. Il n'y a eu ni arrivée ni départ de courrier depuis trois semaines et tout le monde à bord commence à être un peu énervé. Le courrier sur un bateau en campagne, c'est très important pour le moral de l'équipage. Manifestement, les responsables de la Poste Navale à Paris et à La Réunion s'en f...... complètement.
J'attends un colis de Joëlle (mon épouse) depuis deux mois et une lettre écrite il y a dix jours n'a toujours pas quitté Mayotte !
Je me demande pourquoi cette île a choisi de rester française alors que nous n'avons rien fait pour eux depuis 200 ans. Il n'y a même pas de quai pour recevoir les bateaux.
Demain arrivera - enfin - un avion de La Réunion avec 450 kg de courrier pour le Bourdais. Cela doit représenter plusieurs centaines de lettres !
Il y a à bord un premier maître mécanicien qui s'appelle Péron comme moi. Il rentre en France (en Bretagne, évidemment) après-demain via La Réunion par le même avion qui nous aura apporté le courrier. Je lui confierai probablement cette lettre. Elle sera postée vendredi à la gare Montparnasse, c'est plus sûr.

Nous continuons à patrouiller entre les îles pour nous assurer que l' "Etat Comorien" ne cherche pas querelle à l'île de Mayotte qui a choisi de rester française. Actuellement, c'est très calme et les Comoriens semblent plus préoccupés à résoudre leurs problèmes intérieurs - politique et économique - qu'à envahir Mayotte.

Le 25, nous serons aux Seychelles pour les fêtes de l'indépendance, en visite officielle. Le ministre Stirn sera là ainsi que l'amiral commandant l'Océan Indien et le général de La Réunion, sans parler des Anglais, des Russes et des Américains qui sont également invités. Que de cocktails en perspective !

En septembre, nous allons à Mombasa au Kenya. C'est un des pays d'Afrique qui possède les plus belles réserves naturelles d'animaux sauvages (lions, éléphants, rhinocéros, etc.). Il y aura de magnifiques safaris photo à faire.

A part ça, pas grand chose à vous raconter. Les jours se suivent et se ressemblent sur un bateau, surtout quand on y vit pratiquement en permanence pendant plusieurs mois. Heureusement que je suis à peu près bien logé et que l'air conditionné fonctionne correctement. En mer, le temps passe vite. Au mouillage, on ne travaille pas l'après-midi. Trop chaud. Sieste obligatoire en saison chaude jusqu'à 15H00 au moins.
etc. etc.

Les mémoires, écrites vingt ou trente ans plus tard, c'est bien mais quand on a la chance de retrouver des récits d'époque où tout est raconté en direct-live, en temps réel, c'est mieux. Merci Papa ! Merci Maman !

MAX je pense que tes parents, ont du acheter une carte du monde, pour regarder ou tu te trouvais à chaque lettre.