Comment comprendre les déchirements qui pourrissent un état grand comme deux départements français depuis plus de 30 ans...
Prommis juré, vous aurez des photos assez rapidement, pour vous montrer cette "suisse du moyen orient" sous un autre visage...
En attendant, le pack de biere ou l'aspirine...au choix...
LE LIBAN DES EMIRS: LES MAAN
Apparition des émirs Maan
Depuis le XIe siècle, les peuples venus du cœur de l'Asie déferlaient sur le Proche-Orient par vagues successives. L'une d'elles le submergea : en 1453, les Turcs Ottomans prenaient Constantinople, mettant fin à l'Empire byzantin qui avait jusque-là contenu l'expansion de l'Islam vers le nord.
Entre les Ottomans de Constantinople et les Mamelouke du Caire s'étendait la Syrie, cette proie qui avait suscité la convoitise de tous les souverains de l'Orient. Les Ottomans ne firent pas exception à la règle. au début du XVIe siècle, sous le prétexte d'assurer la sécurité de la route du grand pèlerinage, leur sultan, Selim 1er, attaqua l'Empire du Mamelouk Ghoûri. Les deux souverains se rencontrèrent à la tête de leurs armées à Dâbiq, près d'Alep, en 1516. Les Mamelouks furent écrasés dans une bataille où Ghoûri trouve la mort, et qui livra la Syrie tout entière à leurs ennemis. Alep, Hama, Homs, Tripoli, Jérusalem, se rendirent à la première sommation, Damas fut enlevée en quelques jours. Maîtres du pays, les Turcs Ottomans devaient le conserver jusqu'en 1918.
Ces grands événements devaient avoir dans la montagne libanaise des répercussions importantes. Cette région était alors partagée en un grand nombre de principautés semi-autonomes : les Kesrouan et le pays de Jbail étaient l'apanage de la famille turcomane des Bano Assaf. Les Banou Saifa - Kurdes ou Turcomans - étaient installés dans la région de Tripoli, d'où ils surveillaient les tribus turbulentes de l'Akkar et de la montagne Nosaïri. L'Akkar et la Békaa étaient occupés par les Chiites, Hamada et Harfouch. Dans la Vallée Sainte, que tenaient solidement les Maronites, ceux-ci dépendaient de chefs locaux, les mokaddem, seuls responsables devant le pacha de Tripoli. Dans le Sud, le Wadi Taym était partagé entre des chefs druzes, chiites et sunnites ; ces derniers, les émirs Chehab, alliés et apparentés aux Maan. En bref, chacun des replis du Liban était l'apanage d'une petite dynastie. Naturellement, ces composantes passaient leur temps à guerroyer. Non seulement les questions de face, de religion, et les querelles de voisinage les opposaient, mais encore les Ottomans les employaient à faire leur propre police en les jetant les uns contre les autres. La petite histoire du Liban au XVIe siècle est le récit d'une longue suite de batailles, de pillages et d'assassinats.
De la mosaïque des principautés émergeait cependant l'une d'entre elles, celle que gouvernaient les Tanoûkh, dont l'influence s'étendait bien au-delà du Gharb, leur fief originel. Les Tanoûkh paraissaient avoir vocation de fédérateurs. Malheureusement, dans la guerre qui opposa Mamelouks d'Egypte et Ottomans, ils ne firent pas preuve de la même habileté que leurs ancêtres: non seulement ils ne surent pas se partager entre les deux camps, mais encore ils choisirent le perdant, celui des Mamelouks. Les Ottomans victorieux les chassèrent de leurs fiefs et choisirent pour les remplacer les Banoû Maan, qui apparaissaient à ce moment sur le devant de la scène libanaise.
Installés depuis longtemps dans le Chouf, les Maan étaient des Druzes d'origine kurde, comme beaucoup d'autres grandes familles druzes : les Arslan et les Joumblat (Jamboulad) en particulier.
Les Maan devinrent alors les plus puissants seigneurs du Liban central, en la personne de Fakhreddin 1er, puis de son fils Korkmaz. Ni l'un ni l'autre ne surent conserver la faveur des Ottomans tous deux périrent assassinés.
Fakhreddin II - Le fils de Korkmaz, qui succéda à son père sous le nom de Fakhreddin II à l'âge de 18 ans, en 1590, devait en revanche connaître un grand destin : « Du milieu des luttes mesquines où s'épuisait la vitalité du Liban, un homme allait surgir, lequel fixerait sur son énergique personnalité, pendant près d'un demi-siècle, l’attention de la Syrie et du monde chrétien. Animé d'une haine farouche contre les Ottomans, qui avaient fait périr son grand-père et son père, le jeune émir, tout au long de son règne, consacra son énergie à les combattre, par la force et par la ruse.
Mais un simple émir du Chouf ne pouvait espérer résister à la puissance ottomane. Fakhreddin commença donc par élargir son domaine. II n’hésita pas à attaquer d'abord ses plus puissants voisins :les Banoû Saifa, qui, après avoir éliminé les Assaf, étendaient leur domination sur tout le Liban nord et au-delà. A la tête de ses cavaliers et de ses arquebusiers druzes, il les battit et s'empara de leurs domaines. Puis il soumit les Harfouch, s'assurant la possession de la riche Békaa, et une voie de communication avec ses alliés druzes du Waditaym. Se tournant ensuite vers les Bédouins et les Métoualis du Sud. il conquit la Galilée, étendant ses possessions jusqu'à Safed, Banias et Ajloun, et s'assurant le contrôle des routes de Jérusalem et de la Palestine.
L'émir ne se contentait pas d'élargir son territoire. Il s'employait à développer son commerce extérieur, et cherchait des alliances en Europe. Ces deux préoccupations l'amenèrent à engager des négociations avec les Florentins, qui, de leur côté, tentaient désespérément d'aborder au Levant, d’où les avaient jusqu'alors repoussés leurs rivaux Vénitiens. Ces négociations aboutirent à la signature entre l'émir et le grand-duc de Toscane d'un accord de commerce assorti de clauses militaires secrètes, évidemment dirigées contre la Turquie. Fakhreddin agissait comme un souverain indépendant et, qui plus est, comme un souverain hostile. Son audace avait cette fois dépassé les limites que Stamboul jugeait tolérables ; le sultan ordonna au gouverneur de Damas de marcher contre l'émir séparatiste et envoya une escadre de 60 galères croiser dans les eaux libanaises pour y soutenir ses troupes.
Le malheur de Fakhreddin voulut que le gouvernement de Damas fût alors passé aux mains de Ahmed Hafez, un pacha habile, énergique et impitoyable. Hafez-pacha n'avait pas attendu les ordres de la Porte pour exciter contre Fakhreddin un certain nombre d'émirs, qui supportaient mal son autoritarisme et ses exigences financières. Aussi, lorsque les troupes turques se mirent en marche, Fakhreddin vit-il un certain nombre de ses indociles vassaux druzes se joindre aux janissaires du pacha ; au Wâditaym, quelques-uns des émirs Chehab, qui avaient été jusque-là ses plus fidèles alliés, se tournèrent contre lui. Hafez-pacha envahit le Liban et y commit de terribles dévastations; l'année 1613, pendant laquelle se déroulèrent ces événements, demeura tristement célèbre sous le nom de « année de Hafez ».
Pour éviter la ruine complète du pays, Fakhreddin résolut d'abandonner le pouvoir. Il chargea son fils aîné, Ali, aidé de son frère Younis, de gérer ce qui restait de ses domaines, et, s'embarquant sur un navire français, il gagna la Toscane. Chaleureusement accueilli par les grands-ducs Médicis, l'émir voyagea dans toute l'Italie. Il séjourna à Florence, à Pise, à Messine, à Palerme, à Malte. Il visita des arsenaux, des hôpitaux, des musées, il s'initia aux méthodes bancaires des Florentins, étudia les méthodes agricoles italiennes, rencontra à Rome les érudits; maronites que protégeait le Pape.
L'exil de Fakhreddin dura cinq ans. En 1618, son ennemi Hafez-pacha ayant quitté le gouvernement de Damas, il obtint du sultan l'autorisation de rentrer dans son pays et la restitution de ses domaines. Pendant les 17 ans que durera cette seconde partie de son gouvernement, il portera sa puissance à des sommets où il apparaît comme un prince de légende, mais d’où la chute sera tragique.
A peine a-t-il repris; en main l'administration de ses domaines qu'il entreprend de les étendre à nouveau. Les Turcs le font attaquer derechef par les troupes du pacha de Damas. Mais ce n'est plus le redoutable Hafez qui commande les Ottomans. C'est un nouveau pacha, qui est vaincu à la bataille d'Anjar et fait prisonnier. Fakhreddin a l'habileté de traiter le pacha avec des égards et de le renvoyer à son gouvernement comblé de présents ; si bien que la Porte feint d'oublier cet épisode. Quelques années plus tard, c'est le gouverneur de Tripoli que l'émir met à la raison. Puis il déborde ses frontières, envahit la Palestine et parait à Naplouse et à Gaza, sur les routes de Jérusalem et de I'Egypte. Ces incursions laissent présager des ambitions qui inquiètent le sultan ; tout en reconnaissant à son vassal le titre étonnant de soltan el barr - sultan du continent - il se prépare à l'abattre. Le point de rupture est atteint une nouvelle fois en 1634, après que l'émir a accompli une action vraiment étonnante : il refuse à l'armée ottomane rentrant de Perse de tenir ses quartiers sur ses domaines. Les Turcs ayant passé outre et s'étant arrêtés dans la région de Tripoli, il va les attaquer, et, après une sanglante bataille, il les reconduit jusque sous les murs de Damas.
On ouvrit à Stamboul le dossier de l'émir, " lequel - écrit l'historien Mohibbi - avait atteint un tel degré de puissance qu'il ne lui restait plus qu’à prétendre au sultanat ". Fakhreddin II, contempteur de la loi coranique, protecteur des Chrétiens, bâtisseur de monastères, accusé d'entretenir des intelligences coupables avec la Toscane, l'Espagne, et les chevaliers de Malte, fut condamné. Une puissante armée fut envoyée contre lui, tandis que la flotte allait bloquer le port de Saida.
Cette fois, les moyens mis en oeuvre étaient tels que l'émir ne pouvait vaincre. L'élite de son armée, et parmi elle ses deux fils Ali et Younès, périt dans la bataille de Waditayn. Finalement, Fakhreddin fut capturé par les Turcs. Emmené à Stamboul, il y fut exécuté le 13 avril 1635.
Le prestige de l'émir était tel que, pour éviter un embrasement général de la montagne libanaise, le sultan dut confier sa succession à son neveu Melhem, puis au fils de celui-ci, Ahmed, qui mourut sans postérité male en 1697.
L'étroite surveillance à laquelle la Porte soumit ces émirs ne leur permit pas d'accomplir de brillantes actions ; mais ils gouvernèrent sagement, dans la tradition libérale de leurs grands ancêtres.