Campagne océanographique dans le canal de Mozambique
Bien peu de marins peuvent se vanter d’avoir subi une inspection en tenue bleu de drap à Diégo Suarez.
C’est pourtant ce qui était arrivé à l’équipage du Robert Giraud, à la veille d’une campagne océanographique qui devait le conduire dans le sud du canal de Mozambique, une escale étant prévue à Durban, la tenue d’hiver avait été sortie du cocon, afin d’en vérifier l’état.
Parti de Diégo le 17 juillet 1960, après une première escale à Majunga, une seconde à Nossi Bé pour l’embarquement des scientifiques et du matériel, le dernier port touché Malgache avait été Tuléar
Tuléar, au climat plus tempéré que Diégo avec sa longue jetée sur pilotis.
Un retour à bord s’était effectué en pousse pousse, réticent pour ma part à utiliser ce mode de transport, ce retour s’était transformé en course, les tireurs Malgaches peu rassurés pour leur matériel étant devenu les passagers, les matelots dans les timons.
Après quelques jours de navigation, nous avions découvert Durban.
Je n’ai pas gardé un bon souvenir de la visite organisée du village d’une réserve Zoulou.
Le spectacle de ces gens exhibés dans le simulacre de ce qui était censé être leur vie de tous les jours était navrant.
En ville, c’était l’apartheid , avec ses quartiers blancs, que tous les noirs devaient quitter le soir, choquant pour nous qui venions de Madagascar.
Je constaterai cette même ségrégation quelques années plus tard aux Etats Unis, mais aussi plus près de la France, au cours de séjours dans les docks de Londres.
Tireurs de pousses ici aussi, seule différence avec leurs collègues de la Grande Ile, leurs tailles imposantes et leurs tenues chamarrées.
Le second jour d’escale, avait été sortie libre, les avances sur solde en devises à l’époque étaient équivalentes à un jour de solde, multiplié par le nombre de jours d’escales… Durée légale, 1500 francs CFA par mois…avance deux shillings…
Nous étions trois à faire le tour des banques ou bureaux de change pour convertir nos Francs CFA en monnaie Sud Africaine, en vain, seuls les Francs métro étaient acceptés.
Devant nos mines dépitées, une vieille dame sympathique s’exprimant dans un Français parfait, avait essayé de nous venir en aide, nous conduisant à sa banque, puis chez un ami qui tenait une agence Cook…sans obtenir plus de résultats.
Cette dame nous avait alors gratifié à chacun d’un billet de 10 shillings, en souvenir nous avait elle dit, d’une grand mère qui avait connu l’équipage de la Jeanne d’Arc, lors des escales du croiseur pendant la dernière guerre mondiale.
Cette Dame s’appelait Mercedes Lavoipierre, elle était originaire de l’ile Maurice.
Je ne l’ai jamais oubliée . . .
Daniel
Zoulou tireur de ricksha
Zoulous dans le village d'une "réserve", contraste avec la ville moderne réservée aux blancs.
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