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[ Histoires et histoire ] Expéditions maritimes en Baltique 1854-1855
Noël Gauquelin- MAJOR
- Age : 79
A ma connaissance, l'une des seules choses qu'il en reste est le vocabulaire de l'escrime !
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PAUGAM herve- QM 1
- Age : 80
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Roger Tanguy- MAJOR
- Age : 76
Les prisonniers, à charge des Britanniques, ont été conduits, dans un premier temps à Portsmouth, bien connu pour ses infâmes bateaux-prison, les sinistres pontons. Pour eux l’aventure commence là. A leur arrivée ils sont internés sur le ponton Devonshire. La nourriture y est distribuée avec parcimonie. Si à l’île d’Aix, on comptait beaucoup de Polonais dans les prisonniers "russes", ici ce sont des Finlandais. Ils sont entre 300 et 400 qui appartiennent au régiment finlandais de grenadiers fusiliers. Selon un historien finlandais leur voyage depuis Bomarsund, à bord du transport Saint Vincent a duré plusieurs semaines. Les hamacs étaient infestés de poux abandonnés là par les Français. Enfin, c’est l’historien qui le prétend. En octobre 1854, amaigris, ils sont transférés dans un ancien pénitencier à Lewes, un chef-lieu tranquille, près de Brighton.
Là, la vie prend une nouvelle tournure. Ils sont bien traités, sortis une fois par semaine pour respirer l’air de la campagne. La première fois qu'ils furent conduits dehors, ils avaient secoué leurs mains pour dire non, s'étaient lamentés. Ils s'étaient imaginé qu'on les sortait pour les exécuter. Ils sont pesés régulièrement pour s’assurer qu’ils reçoivent suffisamment de nourriture.
Tout comme en France, les officiers sont prisonniers sur paroles. Le magazine "Leisure Hour" de 1855 nous dit qu'ils sont 9, dont 2 sont accompagnés de leur épouse et d’un enfant. Ils sont autorisés à loger en ville. Certains sont hébergés par des familles. Ils se sont bien intégrés dans la société locale. Ils sont l'objet de beaucoup d'attention et d'invitations de la part de la petite noblesse locale. Ils sont invités dans les cercles de jeux, à des chasses sur des domaines privés, à des concerts de charité à Brighton et même visitent Londres. Il se dit même qu'ils avaient un certain succès auprès des femmes, et de fait l'un d'eux se fiancera à une Anglaise. Ces officiers sont tous d'origine germanique ou française.
Les hommes du rang, à l'exception de trois ou quatre Russes, sont Finlandais. Leur âge moyen est d'environ 25 ans. Eux, sont enfermés derrière les murs de la prison. Deux d'entre eux sont accompagnés de leur épouse. Ils sont logés dans la prison mais dans des locaux à part. Les épouses peuvent sortir librement en ville.
Ces soldats parlent le Finnois bien sûr mais aussi, pour beaucoup, également le Suédois, et pour près d'un tiers, le Russe. La plupart, si ce n'est tous, savent lire et aiment la lecture.
Les prisonniers disposent d'une grande cuisine où on peut les voir occupés à préparer leurs repas, soupe, bœuf, pommes de terre...
- Spoiler:
- Dans l'établissement pénitentiaire, on trouve une grande salle de lecture, des bains et des ateliers, mais aussi dans la cour, des appentis ouverts où les prisonniers sculptent des petites pièces de bois qui deviendront des jouets, des puzzles en forme de croix, de tours, d'aigles ou des guirlandes. La dextérité des paysans finlandais dans la fabrique d'objets à l'aide d'un couteau est bien connue. Un appentis à été aménagé en point de vente.
La prison est devenue une attraction touristique recevant jusqu'à 500 visiteurs par jour, provenant pour la majorité de la ville de Brighton. La demande pour ces objets est de plus en plus forte et les prix suivent. Les marchands de jouets de Brighton affichent tous " jouets russes" sur leur vitrine. Certains jours la vente de jouets atteint 40 Livres (2700 Livres des années 90). Les recettes sont consacrées à améliorer leurs conditions de vie, l'achat de supplément de nourriture et d'articles de luxe. Selon le Times, les prisonniers étaient trop bien nourris et il n'y avait pratiquement pas un qui n'ait sa montre dont la plupart était en or.
Ce traitement généreux accordé aux prisonniers finlandais n'est pas du goût de tout le monde. Le Times reçoit des lettres de lecteurs outrés qui écrivent : alors que nous voyons dans quelles difficultés se débattent les veuves de nos soldats massacrés et leurs orphelins qui meurent de faim, nous apprenons que pour les prisonniers Russes de Lewes on a fait venir leurs épouses pour vivre auprès eux, qu'ils vendent des jouets autant qu'ils peuvent en fabriquer et pour couronner le tout reçoivent de grosses sommes d'argent de la haute société locale pour se doter en produits de luxe !
Malgré les conditions de détention pour le moins favorables, un mouvement de mutinerie a éclaté. Selon certaines sources, après qu'un groupe d'hommes ait refusé de sortir pour l'exercice tant que trois de leurs camarades placés en cellule d'isolement pour mauvaise conduite, le ton est monté et s'est transformé en mouvement de rébellion. Les officiers finlandais, servant dans l'armée russe, sont tous issus de la noblesse. Néanmoins, le cursus de carrière prévoit un premier temps comme hommes du rang. Dans la prison de Lewes il n'y a pas d'officiers mais il y aurait parmi les détenus des futurs officiers qui auraient mis en avant leur statut pour tenter de s'imposer à leurs camarades, provoquant la révolte. Quoi qu'il en soit, 25 des meneurs sont transférés sur un ponton dans le port de Sheerness, où sont déjà internés de nombreux prisonniers russes.le ponton Devonshire à Sheernessles prisonniers russes sur le Devonshire(images The Illustrated London News - sept. 23 - 1854)La femme d'un officier a donné naissance à un bébé, en novembre 1855. Vu le statut de la mère, libre et vivant de son plein gré en Angleterre, de grandes discussion eurent lieu quant à la nationalité de l'enfant. Les prisonniers jouissent d'une grande popularité à Lewes.
Quand la paix a été signée, en 1856, et le moment de partir venu, la séparation a été un moment difficile. L'officier commandant l'unité des prisonniers a écrit, au nom de ses camarades officiers, à la municipalité pour remercier les habitants de Lewes, exprimer la gratitude de tous aux habitants pour leur hospitalité et leur courtoisie et leur dire que le grand plaisir qu'ils avaient à retourner chez eux était tempéré par les regrets qu'ils ressentaient dans cette séparation. Après une cérémonie à la mairie, les villageois se sont massés le long des rues pour voir partir les "Russes".
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![[ Histoires et histoire ] Expéditions maritimes en Baltique 1854-1855 - Page 5 Rubanreconnaissance](https://2img.net/h/acbpr.fr/cb/insignes/rubanreconnaissance.jpg)
La Marine ce n'est pas un métier, c'est une Aventure
Matelot, alain EGUERRE, VENDEEN69, HèmBé43, CPM73, lefrancois, Christian Suné et QUIQUEMELLE aiment ce message
Roger Tanguy- MAJOR
- Age : 76
Aux enchères (juin 2011), le tableau, acheté par un collectionneur russe, a atteint la somme de 7,6 millions de Couronnes soit environ 1,2 million de dollars.
![[ Histoires et histoire ] Expéditions maritimes en Baltique 1854-1855 - Page 5 Zmg_2019](https://i.servimg.com/u/f27/20/13/84/92/zmg_2019.jpg)
(un peu dans le même ordre d'idée, lorsque j'avais fait un article dans Cols bleus sur le sujet, j'avais reçu, via l'écrivain Henri Queffelec, une lettre d'un de ses amis, ancien universitaire de Uppsala, qui disait qu'il avait depuis des décennies un tableau au mur de son séjour représentant une escadre en mer Baltique dont il ignorait tout. Il avait enfin réponse à ses questions. L'histoire ne dit pas si son tableau valait aussi des millions
![[ Histoires et histoire ] Expéditions maritimes en Baltique 1854-1855 - Page 5 580511](/users/2913/33/99/84/smiles/580511.gif)
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La Marine ce n'est pas un métier, c'est une Aventure
Matelot, VENDEEN69, Noël Gauquelin, HèmBé43, CPM73, lefrancois et QUIQUEMELLE aiment ce message
Roger Tanguy- MAJOR
- Age : 76
Une nouvelle campagne en mer BaltiqueLe titre de la rubrique est "opérations maritimes en mer Baltique en 1854 et en 1855"». Nous avons vu ce qui s’est passé en 1854. " Tout est dans le titre ", dans ce respect, je me dois donc dire un mot sur 1855. Il ne se passera rien de plus significatif que l’année précédente, aussi je ne vais pas m’étendre sur cette nouvelle campagne et ne rapporter essentiellement que les activités notables de notre escadre.
Printemps 1855, en mer Baltique les glaces ne vont pas tarder à se disloquer et rendre libre la navigation le long des côtes de Russie et de Finlande. Le décès du tsar Nicolas 1er, en mars 1855, avait fait naître quelques espoirs de paix mais son successeur, Alexandre II, n'a pas mis fin à la guerre. Les gouvernements anglais et français décident d'une nouvelle expédition en mer Baltique.
Les Anglais ont tiré les leçons de la première campagne, cette fois aucun voilier ne fait partie du voyage. Par contre, on y a inclus un grand nombre de petits bateaux de type canonnières et bombardes. Les départs s’échelonnent entre le 28 mars et le 4 avril.
En France, c’est le contre-amiral Pénaud, né à Brest en 1800, qui a débuté sa carrière comme mousse à 14 ans, et commandait déjà une goélette à 19 ans, qui reçoit le commandement de la division navale française. Comme l’an passé, les Français prennent leur temps. La jonction avec les Anglais ne se fera pas avant le début juin.
Les Russes ne sont pas resté inactifs. La défense de Riga, Revel, a été renforcée. A Sveaborg au moins 70 nouveaux canons ont été montés derrière sept remparts de terre. Cronstad a été dotée d’une nouvelle digue armée de pièces de gros calibre. Des pieux ont été plantés sous la glace pour interdire les approches aux navires. Il se dit que les canaux sont truffées de " machines infernales sous-marines" du professeur Jacobi. Ce Jacobi est un ingénieur physicien prussien qui, en 1853, a conçu une "machine infernale" en l’occurrence une mine sous-marine. Ce professeur, après avoir vu ses offres repoussées avec indignation en France et en Angleterre est allé les faire agréer en Russie (où il fera carrière)… moyennant un petit million quand même.
Comme l’an dernier les Anglais s’en prennent aux navires de commerce et mènent de petites opérations ponctuelles ici ou là sur la côte. Cette fois c’est la variole qui se déclare à bord des vaisseaux. Les malades sont débarqués en Suède.
- Spoiler:
- En route pour Cronstadt – la guerre des mines
Les navires anglais et français mouillent à nouveau devant Cronstadt.
L'amiral Pénaud, qui faisait partie de la première campagne, a hâte de juger par lui-même des changements apportés aux défenses de Cronstadt. Le contre-amiral anglais Dundas, met à sa disposition la corvette à vapeur Merlin commandée par le capitaine de vaisseau Sulivan. Le 9 juin, à 13 h, le Merlin, avec à son bord l'amiral français et plusieurs commandants de navires français et anglais, lève l'ancre.
Deux canonnières russes suivent à distance le Merlin. Elles tirent un boulet dans sa direction plus sans doute pour le dissuader d'approcher que de l'atteindre.
Le Merlin, sous la conduite de son intrépide capitaine reconnaît Cronstadt dans toutes les directions. Alors qu’il file 7 ou 8 nœuds, une terrible secousse se fait sentir à bord, accompagnée d’une détonation sous-marine. Le petit bâtiment est ébranlé comme par un "tremblement de terre", se cabre sur lui-même et semble vouloir s’enfoncer dans les flots. La corvette s'arrête. Sulivan fait battre en arrière. Une seconde mine explose juste devant le caisson de sa roue à aubes à tribord, secouant à nouveau violemment le navire. Le choc a été si fort qu'il est à craindre que le bâtiment fasse eau. Mais il n'en est rien. On fait une visite rapide du bord et le Merlin reprend sa route. "Je crus cette fois que le Merlin était défoncé et qu'il allait couler" , écrit l'amiral Pénaud au ministre de la marine. Mais les avaries sont mineures et vite réparées. Une visite de coque effectuée plus tard au mouillage fera tout de même apparaître quelques feuilles de cuivre endommagées sur les œuvres vives du Merlin.
D’autres navires vont être touchés par ces mines.
Le 21 juin, les navires se lancent, pour la première fois dans l'histoire de la guerre navale, dans la chasse aux mines. En trois jours, trente trois mines sont repêchées, sans grandes précautions. Le contre-amiral Seymour et le capitaine de vaisseau William K. Hall, ayant trouvé une, la remonte dans leur youyou. Ils s'amusent avec, vont la montrer à l'amiral Dundas, et finalement la rapporte à bord de l'Exmouth où ils continuent de la manipuler sans précaution, jusqu'au moment où elle explose jetant à terre ceux qui l'entourent et blessant une demi-douzaine de personnes, y compris l'amiral Seymour. Ils s'en sortent bien. Une mine qui avait explosé sur un bateau russe avait tué 17 hommes.
Ces "machines" fonctionnaient plutôt bien mais étaient bien trop petites pour être dangereuses pour un gros bateau.
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La Marine ce n'est pas un métier, c'est une Aventure
Matelot, alain EGUERRE, VENDEEN69, HèmBé43, CPM73, lefrancois, Christian Suné et QUIQUEMELLE aiment ce message
Roger Tanguy- MAJOR
- Age : 76
La forteresse a été désertée. Les Anglais envoient des hommes à terre pour mettre le feu aux installations. Pendant que les marins anglais boutent le feu maison après maison, ils découvrent une vieille dame dans son lit. Elle refuse absolument de bouger mettant les marins dans l'embarras. Finalement, les marins empoignent le lit et le transportent, avec son occupante, jusqu'à l'église voisine, puis poursuivent leur travail d'incendiaires. Sur les ruines de Ruotsinsalmi sera construite, en 1879, la ville de Kotka . Dans l'église de Kotka, une statue de la dame en rappelle son souvenir, les gens pensant que grâce à elle, l'église n'a pas été brûlée (malheureusement, lorsque je me suis rendu à Kotka, je ne connaissais pas cette anecdote et n’ai pas visité l’église).
Toujours dans la région de Kotka, l'ennemi y étant à nouveau signalé , il est demandé à Yelverton d'y retourner. Les troupes de marine sont débarquées sur l'île. Les Russes sont partis mais ils ont tout incendié derrière eux. Un détachement de soldats d'infanterie de marine est laissé en alerte sur l’île. Soudain, vers minuit, le silence de la nuit est rompu par un grand vacarme. Les hommes empoignent leurs armes et fouillent du regard, d'un côté, l'obscurité du bois de sapins voisin, et de l'autre, les abords éclairés des casernes qui brûlent. Après un moment de tension la cause de tout ce brouhaha apparaît : un cochon poursuivi par un prêtre ! Le cochon s'est échappé des bâtiments en feu, quand au prêtre, il s'agit du révérend Robert Hughes, qui à bord de son yacht, est venu cette année encore assister aux opérations navales dans la Baltique. Les soldats donnent un coup de main au révérend pour capturer le cochon. Son sort est scellé. Demain porc grillé pour tous au menu.
Une rumeur laisse entendre que les Russes renforcent l'entrée de Loviisa. Comme j’ai des souvenirs personnels liés à cette ville, je l’ai retenue, pour ce post, parmi les (mauvaises) actions des Anglais. Vous êtes des anciens comme moi, aussi connaissez vous sans doute le sketch de l’humoriste Jacques Baudouin : la panse de brebis farci. Il dit que lorsqu’il vit le plat il pensa que c’était de la m..de et quand il l’eut goûtée il regretta que ce n’en fut pas. Le sud-ouest de la Finlande a une spécialité : le mämi que l’on confectionne uniquement à Pâques. C’est un plat, de couleur marron, à base de farine de seigle, de malt, de sirop ou mélasse de je ne sais quoi. Visuellement on peut dire la même chose que Jacques Baudouin. J’avais été invité à Loviisa par une indigène collègue de travail à venir partager le mämi. C’est effectivement pas très appétissant mais avec du sucre et de la crème, ça se laisse manger. Mais revenons à nos moutons.
Le captain Yelverton, de l'Arrogant, avec ses hommes, débarque à Loviisa, brûle tous les bâtiments publics et les casernes. Malheureusement, la nuit le feu se propage aux maisons. Une grande partie de la ville est réduite en cendres.
On aura compris, les Anglais mènent la même campagne, sans plan bien établi, que l'an passé et les Français sont à la "traîne".
Lors de sa tournée dans le golfe, le contre-amiral Pénaud a pu constater que les Russes avaient renforcé leur artillerie et massé des troupes le long des côtes. Rien à faire de ce côté là. On ne peut rien faire non plus contre Cronstadt, reste l’autre objectif : la forteresse de Suomenlinna, devant Helsinki. Alors, on y va.
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PAUGAM herve- QM 1
- Age : 80
Une pensée amusée pour Jacques Baudouin , et le petit Philibert
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Roger Tanguy- MAJOR
- Age : 76
Le 22 juillet, il fait un temps magnifique. Le Merlin, suivi de l'aviso Pélican se dirige vers ce groupe de petites îles fortifiées qui s'étendent à l'Est-Sud-Est d'Helsinki. Par rapport à 1854, Pénaud constate que de nouvelles batteries ont été érigées sur des îlots. Toutes les passes qui permettent l'approche de la place ont été condamnées, des vieux navires y ont été coulés, partout des batteries ont été installées et des vaisseaux montent la garde. L'une des îles est occupée par un corps de troupes. Pas de doute, l'ennemi attend et est sur ses gardes.
L'amiral Pénaud émet le désir de descendre sur un de ces îlots, ces rochers, qui avoisinent Suomenlinna, pour juger, sur le terrain, des difficultés éventuelles pour y construire des batteries. L'amiral Dundas s'embarque avec lui dans une yole, accompagné de l'amiral Seymour, du commodore Pelham et du capitaine de frégate Roussin, chef d'état-major de l'escadre française. Pénaud avait remarqué l'îlot Abraham (Abrahaminluoto) susceptible, selon lui, de recevoir une batterie de mortiers, mais c'est vers les rochers de Hunds, à peu près semblables, qu'il se dirige pour ne pas dévoiler à l'ennemi les points réels à partir desquels il allait agir. Les rochers sont nus. On n'y trouve ni terre, ni sable pour remplir les gabions et les sacs à terre. Leur tournée accomplie les amiraux retournent à bord du Merlin.
L'amiral Dundas est particulièrement désireux d'engager une action de guerre pour sortir les escadres de leur inaction, mais, cette seconde visite de Suomenlinna lui laisse des doutes quant à une réussite d'une attaque menée contre cette place forte. Mais il y a, en Angleterre, une opinion publique qui attend un coup d’éclat qu’il faut satisfaire.
- Spoiler:
- Après avoir longuement réfléchi, il fait savoir, le 1er août, à l'amiral Pénaud, qu'il est d'avis de bombarder Suomenlinna, et le plus tôt possible, afin de profiter des derniers beaux jours de la belle saison. L'amiral français l'assure de sa coopération. Pourtant, ce dernier est d'avis d'attaquer, non pas Suomenlinna, mais Helsinki. Finalement, le captain Sulivan s'étant fait l'avocat d'une attaque de Suomenlinna, c'est cette option qui a prévalu. Le bien fondé de cette décision a fait, par la suite, l'objet de nombreux débats. Helsinki était une grande ville prospère. Si les alliés l'avait été bombardée et détruite cela aurait été un sérieux coup porté à l'ennemi et l'embarras dans lequel aurait été plongé toute cette importante population aurait eu un grand impact sur l'opinion public en Russie. Par ailleurs, le bombardement de Suomenlinna n'affectait en rien le prestige militaire des Russes pas plus que le porte-monnaie des personnages influents du pays, et, pardessus tout, était inutile, sinon dangereux, car même si les forts avaient été rasés jusqu'au sol, comme à Bomarsund, leur disparition n'aurait en rien affecté le cours de la guerre.
Les amiraux ont décidé que le bombardement commencera le 9 au matin. L'après-midi du 7 et la journée du 8 sont consacrées aux préparatifs.
Le 7, au crépuscule, deux embarcations portant l'amiral Pénaud, les capitaines d'artillerie de marine Sapia et Mourette ainsi que le lieutenant de vaisseau de Verneuil se dirigent vers l'îlot Abraham . La mer est encore agitée par suite des vents de la veille. La nuit est tombée. Les canots ont de grandes difficultés à trouver un endroit où toucher terre. Ils sont forcés de contourner l'îlot presque en son entier. Le contre-amiral explore le terrain et choisit l'emplacement où sera construit la batterie. A bord des vaisseaux le matériel est prêt. Dans la nuit les canots de la division font la navette pour apporter sur l'îlot des sacs remplis de sable. A onze heures et demie du soir, des hommes exercés à ce travail, commencent, sur le tracé des capitaines d'artillerie, la construction de l'épaulement destiné à protéger la batterie. A deux heures et demi du matin l'aube commence à poindre. L'îlot est aussitôt évacué afin que l'ennemi reste dans l'ignorance des travaux qu'on y exécute. La nuit suivante, dès que l'obscurité le permet, les canots de la division font route à nouveau sur l'îlot. Des corvées de marins sont débarquées pour apporter leur soutien aux artilleurs. Un grand nombre de sacs à terre sont transportés sur le sol accidenté et rocailleux. Le matériel d'artillerie est débarqué, dont les trois mortiers destinés à armer la batterie. Le capitaine Sapia, qui reçu le commandement de la batterie, dirige lui-même les travaux. La poudre est mise à l'abri des projectiles ennemis dans une anfractuosité d'un rocher recouverte d'un blindage. Peu avant trois heures du matin, l'amiral en personne vient se rendre compte de l'avancée des travaux. Un épaulement de 20 mètres de long sur 3m50 de large et 2 m de haut abrite trois mortiers chargés et prêts à faire feu. L'amiral est très satisfait. "Sa" batterie est prête et disposée à une distance relativement proche, distance à laquelle les bombardes ne pourront pas être placées car elles seraient trop exposées.
L'attaque se fera principalement à l'aide des bombardes équipées de mortiers, seize britanniques et cinq françaises, disposées en demi-cercle de part et d'autre de l'île Otherhall, les Français étant placés au centre de la ligne. Les canonnières, un peu à part, ont reçu des canons supplémentaires de gros calibre. Le Stork et le Snapper ont été équipés des nouveaux, et énormes, canons Lancaster. L'amiral Napier avait souhaité les mêmes, mais en 1854 ils n'étaient encore qu'au stade de l'expérimentation. Le dispositif naval a été mis en place par le captain Sulivan.
Tôt le matin du 9 août, les bombardes (mortiers) s'installent à leur poste. Pour mieux surveiller les opérations et être au plus près des lieux de l'action, l'amiral Pénaud quitte le gros vaisseau Tourville pour mettre son pavillon sur l'aviso Pélican commandé par le lieutenant de vaisseau Duperré, fils du célèbre amiral. Tous les navires sont à leur poste de combat, on attend plus que le signal. Il est donné à 7h20. Aussitôt 29 bombes traversent le ciel et tombent sur Suomenlinna.
Les forts ne répondent pas. Probablement que les bombardes, qui ont une longue portée, sont trop éloignées pour les canons. A 9 heures, les bombardes avancent de 400 à 500 mètres. Les canonnières viennent prendre leur place. La canonnade reprend. Cette fois la forteresse répond avec énergie. Les autres navires, répartis en arc de cercle devant les îles fortifiées, bombardent les batteries ennemies. L'assaut devient général et dirigé dans toutes les directions. Cette fois le combat est vraiment engagé.le bombardement de Suomenlinna. Tableau de John Wilson Carmichael
A gauche, premier plan, on reconnait le Duke of Wellington, derrière battant pavillon tricolore le Tourville au centre, il doit s'agir de l'aviso Pélican
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Roger Tanguy- MAJOR
- Age : 76
Sur Abrahamluoto, les artilleurs de marine et les marins ne restent pas les bras croisés. Les canonniers de marine se sont vite mis au courant de la manœuvre des mortiers. La batterie tire sans interruption et est mise à rude épreuve. Un mortier a même éclaté. On peut dire, écrit Pénaud au ministre, que c'est de cet îlot que sont partis nos meilleurs coups.
La nuit venue, les incendies illuminent Suomenlinna. Profitant de la nuit, les Français transportent trois nouveaux mortiers sur Abrahaminluoto.
Au matin du 10, les échanges de tir reprennent de plus belle. Les efforts des assiégés se concentre sur l'îlot Abraham où flotte le pavillon français. Le sol est labouré d'éclats de bombes, de roches, mais, par bonheur, les batteries et leurs servants ne sont pas touchés. Les canonnières ont épuisé leur provision d'obus. Elles accostent les vaisseaux et échangent leurs canons contre des obusiers. La forteresse disparaît sous la fumée des canons mais surtout des incendies qui éclatent de toutes parts, magasins, entrepôts, soutes à munitions, sont la proie des flammes. La journée est ponctuée d'explosions. Le vent, qui s'est levé, propagent les incendies accentuant les destructions. De nombreux boulets passent au-dessus de la citadelle et atteignent la ville d’Helsinki.
La nuit tombe. Elle est illuminée par les incendies. Rien, écrit l'amiral Pénaut, ne peut donner une idée du terrible spectacle qui s'offrait à nos yeux.
Le 11 août, à 4 heures du matin l'amiral Dundas envoie un officier auprès de l'amiral Pénaud pour l'informer qu'il estime le but de l'attaque atteint et qu'il propose de mettre fin au bombardement. Le signal de Cessez le feu est hissé.
Le combat cesse.
- Spoiler:
- Le lendemain, l'îlot Abraham est évacué. En partant, les artilleurs laissent une inscription :9, 10, 11 août 1855Batterie française arméeIls abandonnent également derrière un traîneau de transport sur lequel ils ont peint : Prière de conserver pour l'année prochaine.
par l'artillerie de marine et les matelots canonniers
commandée par le capitaine Sapia
(je fréquentais cet archipel avec mon canot. Je regrette de n’avoir pas connu l’existence de cette inscription, j’aurais évidemment été voir si elle existait toujours et la prendre en photo)
La deuxième campagne de la Baltique, comme la première, s'achève comme elle a commencé, par de petites opérations sans grande importance, capture de petits bateaux de commerce par-ci, destruction d'entrepôts ou de télégraphes par-là.
Fin septembre, la flotte commence à quitter la mer Baltique. Les cinq ou six bâtiments restant partent un par un au fur et à mesure que l'avancement de l'hiver rend le blocus sans objet.
L'année 1855 s'achève. Le bombardement de Suomenlinna aura peut-être apaisé l'attente du public anglais avides d'actions retentissantes, mais comme le souligne un parlementaire on ne peut pas dire que ce jeu qui consiste à exposer de nombreux bateaux, qui coûtent fort cher, aux boulets rouges et aux bombes incendiaires, mais aussi à des navigations en zones difficiles en vaut la chandelle.
En février 1856, le contre-amiral Dundas est reconduit dans ses fonctions de commandant en chef de l'escadre de la Baltique. Mais, le 30 mars est signé le traité de Paris, ratifié le 27 avril. La guerre est finie.CONCLUSIONLa Russie de 1854-1855 fait des efforts pour augmenter sa flotte. Elle menace par ailleurs Constantinople et par là les intérêts Anglais. Il fallait donc à tous prix, pour l’Angleterre, toujours jalouse de ses intérêts, de de sa supériorité navale, arrêter la Russie dans ses idées expansionnistes et anéantir sa flotte et particulièrement celle de la mer Noire. La paix est établie dès que la flotte russe de la mer Noire est détruite.
La Baltique présentait donc un intérêt secondaire. Les Français portent d’ailleurs l’essentiel de leur effort en Crimée, en Mer Noire. En Baltique leur escadre arrive bien en retard et se retire dès que l’occasion se présente.
Cette expédition aura peut être eu le mérite d’immobiliser dans le nord 200000 soldats russes qui n’ont pu intervenir sur le front de Crimée.
Par ailleurs, la victoire finale des Français et des Anglais dans cette guerre dite de Crimée, au regard des forces en présence, peut paraître surprenante. Certes, la force navale des alliés est, sans conteste, supérieure à celle de leur adversaire, mais c'est à terre que tout s'est joué. Or, à terre, les corps expéditionnaires sont limités : 10 000 hommes en Baltique (30000 si on compte les marins), à peine 350000 en Mer Noire, en comparaison d’une armée russe qui comptera jusqu’à près de deux millions d’hommes qui, contrairement aux occidentaux qui sont déployés à plus de 2 000 kilomètres de leurs bases, opère à domicile et s’appuie sur un immense arrière continental (qui avait été fatal à Napoléon). L’explication est que les alliés, maîtres des mers, pourront très facilement ravitailler leurs corps expéditionnaires à terre (en Crimée notamment) par les routes maritimes tandis que les Russes face à l’indigence des transports intérieurs se retrouveront démunis de tout approvisionnement et dans l’incapacité de poursuivre la résistance.
1985 - 130 ans plus tard, un marin français prend pied sur l'un des îlots fortifiés de Suomenlinna.
Avec mon canot, en été, je naviguais dans les chenaux de l'archipel, en hiver, je fréquentais les mêmes chenaux... en voiture.FIN
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Beau travail de recherche entre Finlande et Paris
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Commez les copains , je me suis régalé à sa lecture
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